Craftwashing et greenwashing

Des anglicismes, certes, pourtant efficaces, lorsqu’on les connait.
Comment d’abord comprendre ces deux termes et les définir ?

Le washing peut être traduit par « lavage de cerveau », qui est une expression tout de même hautement impactante. Le craft se réfère à la fabrication artisanale, tandis que le green à l’écologie. Autrement dit, l’impact de la fabrication, du produit fini etc.
Cela désignent des pratiques de marketing trompeuses qui donnent une fausse impression d’engagement environnemental, et cela est crucial de savoir distinguer le vrai du faux.

Des mots clés attractifs

Rapidement, je n’ai pas souhaité jouer avec les mots clés que l’on retrouve désormais beaucoup dans le secteur de la cosmétique. J’entends par là, zéro déchet, bio, naturel, ecofriendly… Malgré tout le potentiel que véhiculent ces termes, ils ne résonnent plus en moi. Très souvent entendus et employés (à juste titre pour certain.es, entendons-nous), le greenwashing est malheureusement passé par là avec ses grosses bottes pleines de boue et a essoré l’essence même de ces mots pour en faire la même chose que ses produits : quelque chose sans grande qualité. Un terme utilisé sans fin finit par se perdre son impact.

Un savon solide et artisanal, à mes yeux, est un objet précieux et nécessaire. Le savon saponifié à froid, les produits cosmétiques bruts, ou peu transformés ont de réels bienfaits. On pense souvent au sport, à l’alimentation… Pourtant, la peau, nettoyée et nourrie correctement, contribue aussi à notre santé.

Voici quelques termes vagues, des mots clés qui rassurent, que l’on retrouve (trop) sur les produits industriels. Ils sont pourtant (la plupart du temps), très trompeurs. J’évoquerai beaucoup Snoap, afin de me positionner aussi clairement parmi ces termes.

Zéro-déchet

J’ai beau faire attention, la fabrication de mes savons, même à petite échelle, n’est pas parfaite. Elle n’est pas zéro-déchet, puisque je génère du déchet. Livraison des matières premières, conditionnées dans des emballages plastiques (bidons, bouteilles). L’avantage du conditionnement plastique, c’est qu’il y a moins de risque de casse et donc de gaspillage.
Pour protéger mes produits, je les emballe la plupart du temps dans du papier craft. L’étiquetage est de toutes façons obligatoire pour des raisons de sécurité. Malgré tout, cela reste un emballage dit « perdu » et difficilement réutilisable.
Je laisse cependant le choix, sur les marchés ou ma boutique en ligne, de l’emballage ou non.
Le zéro-déchet peut alors concerner le consommateur final. Je pense que ce qui me dérange dans cette expression, c’est son caractère absolu.

Bio

Déjà, qu’est ce qu’un label bio ? Il s’agit d’une ligne directrice de critères à respecter ; un cahier des charges. Le bio a évidemment le mérite d’exister. Seulement, les règles ne sont pas les mêmes d’un pays à l’autre. Cela devient complexe lorsque l’on travaille des matières internationales. L’exemple du miel chinois est tout à fait représentatif. Détournant toujours un peu plus les critères des pays d’exportation, la Chine parvient à vendre, sous couvert d’une jolie étiquette et d’un label, des mélanges de miels. Parfois ces miels sont coupés au sucre. Pour aller plus loin, je vous invite à regarder le Thinkerview avec Christophe Brusset.

Naturel

Le mot piège. C’est attirant, c’est le retour aux sources, nous vivons nu.es d’air frais et d’eau pure (ou serait-ce l’inverse?). Un savon « naturel » n’existe pas. Je joue avec les mots et c’est important : il serait plus juste de dire « savon composé de matières d’origine naturelle ». Des huiles végétales, du miel, du lait végétal ou animal, des beurres. Et encore, les matières premières sont elles-mêmes des productions. C’est à dire transformation ou extraction d’un fruit, d’une fleur, d’une plante.
C’est peut-être parce que c’est trop long à dire d’ailleurs, « savon à base de matières naturelles ». Alors on raccourcit la dénomination « savons naturels ». C’est plus accrocheur. Et les raccourcis, c’est comme l’inoffensif, c’est tentant et plus facile, mais cela crée des malentendus.
Par ailleurs, on associe très souvent le naturel à l’inoffensif. L’exemple simple des huiles essentielles, contenant des allergènes et pouvant être toxiques à fortes doses, sont pourtant formidables lorsqu’elles sont bien utilisées en toute connaissance.
L’inoffensif est banalisé, puisque justement, c’est inoffensif. Donc on banalise le naturel (CQFD). Voici un exemple probant : un tigre est naturel, mais est-il inoffensif dans un salon avec des enfants?

Alors, sans appeler à la totale méfiance sur les produits consommables (quoi que), je vous invite à avoir un regard plus aiguisé sur le greenwashing des grandes enseignes.
Je me souviens avoir voulu acheter une huile de jojoba, il y a quelques années. Ayant une idée des prix du marché, je trouvais cette huile étonnement peu chère. Sur l’étiquette arrière, reprenant sa composition (cela reste obligatoire) je constatais que le produit était coupée à l’huile de tournesol. Pas bien grave certes, mais je me suis sentie dupée entre ce que l’on me proposait, et la réalité du produit. Cela engendre une perte de confiance.

Comment définir mon travail?

Si je devais choisir les propres mots-clés, je choisirais plutôt responsabilité et cohérence. J’essaie, en tous temps, d’être en phase avec mes valeurs (et c’est un sacré temps de recherche). De communiquer tout en transparence, de faire au mieux.
Je m’améliore dès que c’est possible. C’est pour cela aussi que beaucoup de savonnier.es ont le mérite clair d’exister. Certaines grandes marques abusent de notre confiance, en usant de ces mots-clés, si légitimes et puissants, au départ.
Tout cela devrait transparaître dans la qualité même du produit, et non pas par des mots usés-usés-usés. J’espère, au fil de mon aventure savonneuse, pouvoir respecter régulièrement les valeurs que j’inculque au projet.

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